Les auditeurs ont découvert les grands enjeux maritimes de l’Union européenne ainsi que les politiques et les stratégies mises en œuvre pour y faire face. Grace aux interlocuteurs de haut niveau, les auditeurs prennent conscience de comment la France coopère avec ses alliés européens, notamment dans le domaine maritime, pour construire une Europe forte et prospère.
Dès le petit matin du lundi 28 mars, la Représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne (RPUE) a accueilli les auditeurs pour une conférence introductive animée par le général de brigade aérienne Nicolas CHAMBAZ, représentant militaire adjoint auprès du Comité militaire de l’UE, et de Benoît CORMIER, représentant permanent adjoint de la France auprès du Comité politique et de sécurité (COPS) de l’UE.
Les auditeurs ont pu ensuite débattre sur les grands enjeux des opérations navales de l’UE en présence du Vice-Amiral-Escadre Hervé BLÉJEAN, directeur général de l’état-major de l’UE.
La mission a continué par la visite de Parlement européen. Olivier LE SAEC, administrateur, a présenté aux auditeurs cette institution représentant les 450 millions de citoyens des 27 États membres de l’UE. Cette situation au cœur de la citoyenneté européenne requiert l’acquisition d’une culture basée sur la concertation et le consensus loin d’être innée chez les parlementaires de certains pays.
La visite de l’hémicycle a constitué un moment fort pour les auditeurs qui ont touché du doigt la complexité d’un fonctionnement à 27 États. On compte 705 parlementaires débâtant ensemble et bénéficiant d’une traduction simultanée, chacun dans sa langue maternelle.
Dès potron-minet le mardi 28 mars, les auditeurs ont appareillé pour une journée sous le niveau de la mer à étudier la politique d’un pays maritime par excellence : les Pays-Bas. Accueillis à La Haye par S.E.M. François ALABRUNE, ambassadeur de France, et ses principaux conseillers, les auditeurs ont pris la mesure des relations bilatérales souvent méconnues entre la France et les Pays-Bas.
Majoritairement économiques dans le passé, ces relations se renforcent en effet très rapidement dans les domaines de la défense et de la sécurité. Les deux pays partagent des approches et des intérêts communs. Par ailleurs, ils disposent de forces militaires d’un excellent niveau capables de conduire ensemble des opérations de haute intensité. Les deux tables-rondes organisées par l’ambassade ont donné lieu à de riches débats. La première sur la politique maritime intégrée néerlandaise fut articulée autour des deux interventions particulièrement riches de M. Lodewijk ABSPOEL du ministère des infrastructures et de l’eau, une conseillère pour la sécurité auprès du Premier ministre et du capitaine de vaisseau Ivo MOERMAN, directeur de la stratégie de la Marine néerlandaise.
La seconde table ronde a porté sur la sécurité portuaire avec les interventions de M. Tom SCHOEN, conseiller pour la sécurité portuaire au ministère des infrastructures et de l’eau, et de Mme. Kimini DELFOS, responsable du programme « Protection des infrastructures de la mer du Nord » et des conséquences de la guerre en Ukraine. Les auditeurs ont ainsi pu débattre des grands enjeux liés à la lutte contre les différentes formes de criminalité et de mieux mesurer combien le terrorisme, la cybersécurité et la lutte contre les trafics de stupéfiants notamment sont au cœur des préoccupation du gouvernement néerlandais.
Les auditeurs ont ainsi pu découvrir les nombreux points de convergence entre les deux pays. Mais ils ont surtout découvert une très forte culture de la négociation, du compromis et du consensus, symbolisé par le traditionnel « modèle polder », dont les Français pourraient s’inspirer plus souvent.
Cette longue journée s’est terminée avec la présentation du port de Rotterdam, premier port européen par M. Mark DIJK, directeur des relations extérieures de l’Autorité portuaire de Rotterdam. Avec une approche très économique et une parfaite connaissance du monde maritime, il a présenté les défis relevés par le port de Rotterdam, et le développement de ce hub impressionnant qui représente à lui seul plus de 8.5 % du PIB du pays. Après ce moment fort de la mission, les auditeurs rejoignirent Bruxelles pour un repos bien mérité.
Le troisième jour de la mission a permis d’approfondir plusieurs domaines stratégiques de la politique maritime intégrée (PMI) de l’Union européenne.
Une première table ronde sur la coopération structurée permanente (CSP) a rassemblé l’ingénieur général de l’armement Raymond LEVET, Conseiller armement UE/OTAN au sein de la RPUE et François DUPONT, représentant à Bruxelles de naval Group. Sans méconnaître la fragmentation trop importante en Europe de l’industrie de défense et les difficultés liées à la durée des processus d’appel à projet, ils ont souligné les importants progrès réalisés en quelques années dans le domaine capacitaire, notamment avec le fond européen de défense (FED) et surtout la guerre en Ukraine qui a donné une nouvelle dynamique à la facilité européenne de paix (FEP), instrument qui a permis à l’UE d’apporter une aide militaire à ce pays avec une réactivité remarquable.
La deuxième table ronde sur la stratégie de sureté maritime de l’UE (SSMUE) et son plan d’action qui viennent d’être réactualisés a rassemblé Jérôme Montagu du service européen de l’action extérieure (SEAE) et Christos THEOPHILOU de la DG Mare. Les débats ont mis en évidence le caractère planétaire de risques croissants dans le domaine maritime (piraterie, pêche illégale…) et la nécessité pour l’UE d’avoir une politique de sûreté maritime incluant des zones aussi lointaines que l’Indo-Pacifique. Pour ce faire, une action commune des États-membres inspirée par la boussole stratégique a redonné une nouvelle impulsion à la CSP, mais surtout à la présence maritime coordonnée qui ayant été très efficace dans le golfe de Guinée, est étendue à la Méditerranée et au nord de l’océan Indien. Cette PMC pourra bientôt bénéficier de l’aboutissement, au plus tard en 2025, du projet CISE (common information sharing environment) qui doit en être la clé de voûte.
Après le déjeuner, la réflexion a porté sur l’action de l’UE dans des zones maritimes stratégiques du globe, du Golfe de Guinée à l’Asie, avec le capitaine de frégate Rémy GOARDOU et Pierre FERMIGIER, tous deux du SEAE et respectivement chargés de l’Afrique et de l’Indo-Pacifique. Les auditeurs ont ainsi pu constater la volonté de l’UE de se positionner sur le plan maritime comme un acteur mondial et de découvrir les détails de la mise en œuvre de la PMC pilotée par la cellule de coordination des espace maritimes (MAIC[1]).
[1] Maritime areas coordination cell.
Félix LEINEMANN, de la DG MARE, grand ami de l’IHEDN, a ensuite présenté la nouvelle approche de l’UE pour une économie bleue durable qui, au-delà de la croissance bleue précédente limitée à quelques secteurs, aborde la totalité des domaines de l’économie maritime. Une nouvelle approche qui s’appuie sur la transformation des chaînes de valeur selon quatre piliers : la décarbonation, la protection de la biodiversité, une alimentation et une répartition de l’eau responsables, et la promotion d’une économie circulaire visant notamment une forte réduction de la production de plastiques.
L’après-midi a continué avec Théo BARBE et Paul AVRILLIER, conseillers « pêche » et « transport » de la RPUE. Ces derniers ont permis aux auditeurs de découvrir la bonne gestion de ces sujets par la politique maritime intégrée de l’Union, notamment comment la politique commune de la pêche a permis la reconstitution de certains stocks de poissons et comment l’UE décline en son sein les préconisations de l’OMI.
Enfin, Geneviève PONS, Directrice générale d’Europe de l’Institut Europe Jacques Delors a clos ce séminaire en présentant aux auditeurs la mission Starfish 2030 destinée à disposer d’un océan juste, sûr et sain. Elle a insisté sur le verdissement de la chaîne alimentaire et du transport maritime ainsi que sur l’importance stratégique du continent antarctique. Elle s’est félicitée des résultats du Forum mondial de la Mer de septembre dernier à Bizerte, apports essentiels pour la 3e conférence des océans qui se tiendra à Nice en 2025.
Ces trois jours intenses d’immersion à Bruxelles et aux Pays-Bas auront permis aux auditeurs d’acquérir une meilleure vision des grands enjeux européens dans le domaine maritime. C’est avec la perspective de retrouver le quotidien de leurs activités professionnelles, mais non sans avoir fait une courte halte pour acheter quelques chocolats qui font la réputation de nos amis belges, que les auditeurs se sont installés dans le Thalys pour rentrer en France.